Très attendue par les geeks, la fibre progresse lentement en France. Promesse électorale du candidat Hollande, l'ensemble de la population française doit avoir accès au Très Haut débit d'ici 10
ans. J'ai visionné les vidéos du sénat sur le sujet: Audition ARCEP présentation, questions et enfin auditions opérateurs (compte-rendus ici).
En préambule, il me semble que les débats sont obscurcis par un certains nombre de non dits qui rendent la situation difficile à comprendre. Je vais essayer de présenter les points de vues des
intervenants puis de les commenter d'un bloc pour éviter les contraguments fragmentaires que l'on voit trop souvent sur le Net.
Position de la ARCEP
L'ARCEP travaille a un document de cadrage qui doit permettre de standardiser la mise en place de THD sur l'ensemble du territoire. La prise en compte de ce document est très variable suivant les
collectivités.
Le cadre réglementaire actuel permet aux opérateurs de déployer à leur propre initiative. L'ARCEP considèrera dans 3 ans s'il y a lieu de le faire évoluer.
L'autorité n'a pour l'instant pas obtenu de planning détaillé sur la mise en place du THD. Elle souhaite un planning Zone par Zone ainsi que des engagments des opérateurs.
A terme, les technologies Cuivre devront être éteintes pour basculer sur la fibre. La zone de Palaiseau est actuellement en cours d'expérimentation.
Les besoins de financement sont évalués à 22 Milliards d'Euros sur 10 ans dont 8 Milliards de fonds publics répartis moitié/moitié entre les collectivités et l'état. La part de l'état provenant
des redevances sur les fréquences de téléphonie mobiles.
Les objectifs étant d'atteindre 50% en des foyers elligibles à au moins 30 Mbits/s d'ici 2017 et 100% en 2025.
Quelques questions /réponses
Q: Le sénateur Yves Rome souhaite une extension de l'objectif à 100 Mbit/s et une accélération des délais de réalisation. Les conventions en cours d'étude permettraient de réaliser les
déploiement en 5 ans alors que le député voudrait (comme les autorités européennes) qu'ils soient ramenés à 3.
Pour lui, il est primorial que le réseau cuivre soit éteint car des progrès technologiques sur le cuivre pourraient retarder voir compromettre la rentabilité du réseau fibre.
R: La commission européenne a retenu le chiffre de 30 Mbits/s repris également implicitement par la feuille de route du gouvernement.
Le délai de démarrage de réalisation dépend de la main d'oeuvre qui doit être formée et ne sera disponible en force suffisante qu'à partir de 2015 / 2016.
Si les politiques souhaitent ramener le délai des conventions de 5 à 3 ans, il suffit d'un arrêté du premier ministre. Les collectivité pourront alors constater la carence et agir en conséquence.
Q: Philippe Leroy se réjouit du retour de l'Etat dans la politique d'aménagement du territoire et souhaite une loi pour rendre obligatoire la mise en place des schémas entre les collectivités et
l'état.
R: L'ARCEP pense qu'il est souhaitable que les régions embauchent un à deux ingénieurs télécoms pour seconder les préfets sur ces questions.
Q: Bruno Sido demande à l'ARCEP comment surmonter les blocages lorsque l'opérateurs historique refuse de créer des sous-répartiteur. (Nota: le sous répartiteur permet de diminuer la distance
entre l'abonné et l'équipement actif et par conséquent d'augmenter les débits ADSL).
R: Point resté sans réponse
Q: Élisabeth Lamure constate que les offres internet grands public sont vendues aux entreprises à des tarifs beaucoup plus honéreux. Elle demande comment réguler ces offres pour revenir à des
tarifs plus acceptables.
R: C'est un chantier prioritaire de l'ARCEP en 2013.
Mon opinion
Avec mon expérience personnelle et forcément limitée, l'objectif de 10 ans me parait dès le début ambitieux. Je pense que dans la globalité ça peut bien se passer, à condition de ne pas voir trop
gros.
Je n'ai jamais vu d'opérateur qui réussisse à industrialiser la fibre. Au mieux, on arrive à faire de l'artisanat de bonne qualité. Le génie civil fibre est généralement lourd, il demande des
préétudes détaillées et donne fréquemment des retards et des surcoûts. Qualifier une fibre est une opération plus compliquée que de qualifier un lien cuivre, parce qu'il faut tester le débit du
lien a des débits largement supérieurs, parce que parfois une légère différence de firmwares entre éléments actifs aboutit à des conséquences erratiques et parce que repérer un défaut d'épissure
sur une fibre demande une certaine technique.
Autant je comprends la volonté des politiques à trouver un cadre, autant je suis un peu inquiet de ce qui pourrait arriver si les déploiements démarraient avec du personnel pas assez qualifié.
Faire un déploiement national en mettant en relation l'arcep directement avec les collectivités conduirait à un débordement de l'autorité centrale. Il me semble opportun d'établir un niveau de
responsabilité intermédiaire dans les régions pour filtrer et hériarchiser les problèmes. C'est d'ailleurs peut-être aussi pour celà que l'arcep souhaite l'embauche d'ingénieurs au niveau
régional.
L'extinction du cuivre... Il arrive qu'une technologie arrive en fin de vie, il faut alors procéder au remplacement de ces technologies par de nouvelles. C'est en général très difficile parce que
l'inventaire est toujours incomplet et on finit toujours par couper quelque chose d'important mais oublié. Certes Palaiseau donne de bon résultats mais c'est une expérimentation...avec des gens
qualifiés...sous le regard des politiques...
Il arrive également que certains projets deviennent trop coûteux quand on rencontre des imprévus. Que se passera-t-il si des portions de zone deviennent trop difficiles à déployer ? Certes les
collectivités vont pouvoir dénoncer la carrence mais après qui paiera ? Je ne vois pas les opérateurs prendre des risques pareils sans avoir des marges conséquentes.
Point non évoqué, quid des équipementiers français ? A-t-on moyen de favoriser nos industries à coûts raisonnables ?
Et enfin, la question de M. Sido est un réel problème, en attendant que faire sur les défauts de couverture ?